Bébé arc-en-ciel

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« Peut-on dire que nous n’avons pas aimé notre grossesse ? Cela veut-il obligatoirement dire qu’on aimera pas notre enfant ?  Le regard et les dires des personnes, c’est ce qui m’a le plus touché pendant ma grossesse et pourtant j’ai eu une grossesse compliqué.

Voici mon histoire.

Tout d’abord je suis tombé enceinte une première fois. Nous l’avons su à 1 mois de grossesse. Doit-on l’annoncer ? Doit-on garder ça pour nous car il y a la règle des 3 mois ? Qui a établi cette règle ? Elle ne veux strictement rien dire mais bon faisons comme tout le monde, c’est ma première grossesse. Finalement nous l’annonçons qu’à une petit poignée de personnes qui sont absolument ravis pour nous, mais le secret est dur à garder aussi. Et les conseils commencent … « Faut que tu fasses ci, faut que tu fasse ça. » Étant une future maman fumeuse, je me doutais bien que les réflexions fuseraient mais pas au point de me faire culpabiliser et remettre en doute l’amour que je portais déjà à mon bébé. J’essaie de faire abstraction, heureusement mon compagnon m’aide et m’accompagne à accepter ces critiques.

Quelques pertes de sang pendant une journée, je m’inquiète et regarde sur internet ce que ça pourrait être … Préquelle d’une fausse couche ? Une fois de plus, on me dit d’arrêter de psychoter et de m’inquiéter pour rien. J’écoute les conseils.

Finalement quelque jours plus tard, une nuit, de fortes douleurs m’envahissent. Je perds de plus en plus de sang et là je comprends que quelque chose ne va pas. Que mon corps rejette ce petit être humain que j’aime déjà plus que ma propre vie. Je ne fais pas de bruit pour ne pas réveiller mon compagnon, mais les douleurs sont beaucoup trop fortes, je crie et je pleure, il me rejoint et comprend ce que je suis entrain de vivre. Il reste là à côté de moi démuni, sans pouvoir me soulager, sans pouvoir me réconforter et m’aider. Et mon chien à mes pieds qui est complètement paniqué car il ne comprend pas ce qu’il m’arrive, pourquoi je crie, pourquoi je pleure … Les douleurs s’atténuent, je retourne me coucher, en prenant mon chien tout contre moi pour essayer de trouver un réconfort. Je sais ce que je suis entrain de vivre, une fausse couche. Le dire à haute voix m’est impossible. Je dis à mon compagnon d’aller travailler, je ne veux pas qu’il vive toute la douleur que je suis entrain de vivre, je veux l’épargner, je veux le protéger de cette nouvelle terrible. Quand je l’entends partir je m’effondre, finalement j’avais besoin qu’il reste à mes côtés.

Je garde espoir je me dis que ça peut arriver ce genre de douleurs. On m’a dit que ça arrivait mais on m’avait pas expliqué les différences d’intensités. Alors je continue d’y croire, je continue de croire à la force de mon corps à garder ce petit bébé à l’intérieur de mon ventre, protégé.

Plus tard les douleurs reviennent, je vais aux toilettes et sens que je perds mon bébé. Je le sens physiquement. Cette sensation je la ressens encore aujourd’hui, je crois que je le ressentirai toute ma vie. Je regarde pour être sûre et je le vois. Ça y est, c’est fini. J’ai perdu mon bébé.

L’espoir s’envole et disparaît à tout jamais. On peut dire que « l’enterrement » de cette petit être n’est pas des plus beau, dans une canalisation …

Je m’effondre, une fois de plus. J’appelle le médecin, la sage femme. On me dit  d’aller aux urgences. Je n’ai qu’une envie c’est de rester au fond de mon lit mais pas le choix, il faut contrôler que tout soit bien partie, oui oui on nous dit ça comme ça. Arrivée aux urgences, je suis rapidement prise en charge par une infirmière, première personne qui me réconforte, ça fait du bien. Elle me dit qu’on doit faire une échographie et pour ça je dois aller au service maternité. Quel idée ! Emmener une femme qui vient de perdre son bébé dans un service entouré de femmes enceintes heureuses avec leurs gros bidons, des bébés qui pleurent. C’est un service remplit de joie et moi je suis là avec toute ma peine, cachant mes pleurs pour ne pas ternir cette joie. 

L’annonce est faite … Mon corps a tout évacué, mais je vais perdre encore du sang pendant quelques jours. L’épreuve est déjà compliquée à vivre mais en plus, elle dure des jours. À chaque fois que je vais aux toilettes, à chaque petite douleur au ventre, les souvenirs remontent et je pleure. Je ne savais pas que je pouvais pleurer autant, que mon corps pouvait produire autant de larmes que ça. Je suis inconsolable. La culpabilité me ronge, j’ai perdu mon bébé, j’ai perdu notre bébé. Mon compagnon lui est désemparé, je le ressens, il ne sait pas quoi faire pour m’aider et me soulager de ce poids, de cette culpabilité. Seulement, sa présence et ses bras me réconfortent, ça estompe petit à petit la douleur.

Maintenant il faut l’annoncer aux gens qui étaient au courant de ma grossesse. C’est dur d’annoncer ce genre de nouvelle. On essaie de me réconforter, de me dire des mots qui soulagent, qui m’apaisent, qui me donnent le courage de surmonter ça. C’est réconfortant et ça m’aide à accepter la situation, ça m’aide à me relever de cette épreuve.

Et puis, il y a les gens qui me disent que c’est rien, que c’était à peine un bébé, qu’il n’était pas viable, que ça arrive fréquemment aux femmes, que c’est normal… Que c’est normal ? Que répondre à ce genre de chose ? Surtout quand ces personnes n’ont jamais vécu ce qu’on vient de vivre. Je m’éloigne de ces personnes pensant guérir plus facilement. Et ça marche. Je comprends l’importance et la chance que j’ai d’être entourée de personnes bienveillantes. 

Quelques semaine plus tard, nous apprenons la bonne nouvelle. Mon corps me fait le cadeau d’accueillir de nouveau un petit bébé dans mon ventre.  Les pleurs restent mais la douleur s’estompe petit à petit, la vie continue et elle doit continuer. Je dois me battre pour protéger ce petit être en moi. Il n’y est pour rien de ma précédente mésaventure et je dois le protéger de ma tristesse, de ma culpabilité. Aujourd’hui, je le protègerai de tout.

On appelle ces bébés, les bébés arc-en-ciel, porteurs de joie malgré la noirceur et la tristesse. »

landscape photography of gray land field

Témoignage de Pauline Billat

Un grand merci à elle d’avoir ouvert son coeur de nous partager son histoire, pour son courage, son authenticité et sa force.

Cette rubrique est dédiée à vous toutes, si tu ressens le besoin de t’exprimer sur le sujet, n’hésite pas à me contacter.

Groupe de parole

Cela fait quelques temps que je songe à former un groupe de parole, soutien et entraide pour les femmes en deuil. Le but est de libérer la parole pour mettre les mots sur ces maux si difficiles à exprimer. Si c’est un projet qui te parle n’hésite pas à m’envoyer un message ou un mail à l’adresse suivante : elodiekaioun.developpement@gmail.com

Avec tout mon amour,

Élodie

Un commentaire sur “Bébé arc-en-ciel

  1. Ma première fille est aussi un bébé arc en ciel, avant elle j’ai perdu un petit cœur à 2 mois et demi, et vécu cela seule, mon mari n’a jamais voulu en parler et ne m’a d’ailleurs pas adressé la parole de toute cette journée, le Gyneco m’a dit et bien c’est un œuf clair, ça va partir tout seul… oui super comme parole à entendre, puis ma mère qui m’a dit c’est rien tu es jeune tu en auras d’autres… bref grand désarroi et beaucoup de tristesse en moi, que je n’ai pu évacuer quand des années après car à ce moment là il n’y avait pas autant de libération de la parole autour de la perte d’une enfant… voilà… je compatis avec toi et je vous souhaite à tous les trois de vivre tout le bonheur possible 🙏🏻❤️😘
    Sybille maman de 2 grandes de 24 et 26 ans

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